Juge de l'Exécution (JEX)

Le Juge de l'Exécution (JEX)  tranche les difficultés survenues lors de l'exécution d'une décision de justice en matière civile.  

Ce juge a été créé par la Loi du 9 juillet 1991 et illustre la volonté du Législateur de simplifier les procédures d’exécution. Il est le juge spécialement compétent en matière de voies d'exécution (c-a-d pour l'exécution forcée d'une décision de justice) et participe à la recherche d’un équilibre entre les droits du créancier et les droits du débiteur.

Une procédure spéciale a donc été créée devant lui.

Les compétences du JEX:

Par principe le recours à un avocat n'est pas obligatoire devant le JEX (sauf en matière de saisie immobilière), il vous faut donc déterminer si ce juge est matériellement compétent au regard de votre litige puis vous devez  rechercher le JEX territorialement compétent.

Compétence matérielle:

Le JEX est compétent pour le contentieux lié à une voie d’exécution, entre un créancier et un débiteur. Il connaît d’un litige en raison de difficultés nées d’une situation juridique définitive. Il va pouvoir statuer sur le titre exécutoire et/ou sur la procédure civile d'exécution en elle-même.

Ses compétences sont prévues par l'article L213-6 du Code de l'Organisation Judiciaire (COJ) qui précise que le JEX connaît, de manière exclusive:

" - Des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre.

De la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle.

Des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires.

Le juge de l'exécution exerce également les compétences particulières qui lui sont dévolues par le code des procédures civiles d'exécution."

Ainsi aucune procédure d'exécution n'est possible sans titre exécutoire et le JEX n’est compétent pour connaître des difficultés nées d’un titre exécutoire que si une mesure d’exécution forcée a déjà été engagée sur le fondement de ce titre.

  • Le titre exécutoire :

Au regard des dispositions de l'article L 111-3 du Code des Procédures Civiles d'Exécution (CPCE), seuls constituent des titres exécutoires:
 de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire ;
 déclarés exécutoires par une décision non susceptible d'un recours suspensif d'exécution, sans préjudice des dispositions du droit de l'Union européenne applicables ;

3° Les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties ;
4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ;
5° Le titre délivré par l'huissier de justice en cas de non-paiement d'un chèque ;
6° Les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d'un jugement.
 : Il cherche à savoir si le titre est bien exécutoire. A t-il été signifié dans les délais ? Les délais de recours sont-ils expirés ? la créance qu'il constate est-elle éteinte par l'effet d'un paiement postérieur ou d'une prescription ?...

  • L'exécution forcée :

Le JEX est également compétent en cas de "contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée". Il existe plusieurs voies d'exécution forcées, telles que la saisie-vente mobilières, la saisie attribution ou encore les mesures d'expulsion, au cours desquelles vous pouvez contester devant le juge le non respect de la procédure.

Exemple 1 : la contestation d'une saisie attribution effectuée par un Huissier de Justice.
NB: La saisie-attribution permet au créancier, porteur d'un titre exécutoire (exemple : un jugement), de saisir entre les mains d'un tiers (exemple : la banque) une créance (somme d'argent) auprès de son débiteur.

Cela signifie que votre créancier peut saisir une certaine somme directement sur votre compte bancaire.

Au regard des dispositions de l'article L 11-2 du CPCE, tous les biens sont par principe saisissables.

Il existe néanmoins des sommes ayant un caractère alimentaire, dont la saisie est interdite, tout comme certains biens, en application des articles L 112-2 et R 112-2 du CPCE.

  • Les biens et sommes insaisissables:

L'article L112-2 du CPCE  énumère les biens et sommes qui ne peuvent faire l'objet d'aucune saisie :

Ne peuvent être saisis :
Les biens que la loi déclare insaisissables ;
2° Les biens que la loi rend incessibles à moins qu'il n'en soit disposé autrement ;
3° Les provisions, sommes et pensions à caractère alimentaire, sauf pour le paiement des aliments déjà fournis par le saisissant à la partie saisie ;
4° Les biens disponibles déclarés insaisissables par le testateur ou le donateur, sauf autorisation du juge, et, pour la portion qu'il détermine, par les créanciers postérieurs à l'acte de donation ou à l'ouverture du legs ;
Les biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail du saisi et de sa famille, si ce n'est pour paiement de leur prix, dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat et sous réserve des dispositions du 6°. Ils deviennent cependant saisissables s'ils se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi demeure ou travaille habituellement, s'ils sont des biens de valeur, en raison notamment de leur importance, de leur matière, de leur rareté, de leur ancienneté ou de leur caractère luxueux, s'ils perdent leur caractère de nécessité en raison de leur quantité ou s'ils constituent des éléments corporels d'un fonds de commerce ;
6° Les biens mobiliers mentionnés au 5°, même pour paiement de leur prix, lorsqu'ils sont la propriété des bénéficiaires de prestations d'aide sociale à l'enfance prévues aux articles L. 222-1 à L. 222-7 du code de l'action sociale et des familles ;
Les objets indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades.

IMPORTANT: Sont notamment insaisissables certaines prestations sociales telles que : RSA,AI, ASS et AHH, Prestations en nature de la sécurité sociale et prestations familiales, Allocations logement et APL, Rentes d'accident de travail... (article L553-4 du Code de la sécurité sociale)

IMPORTANT: Au regard de l'article R 112-2 du CPCE, figurent parmi les biens insaisissables:

"Pour l'application du 5° de l'article L. 112-2 CPCE, sont insaisissables comme étant nécessaires à la vie et au travail du débiteur saisi et de sa famille :
1° Les vêtements ;
2° La literie ;
3° Le linge de maison ;
4° Les objets et produits nécessaires aux soins corporels et à l'entretien des lieux ;
5° Les denrées alimentaires ;
6° Les objets de ménage nécessaires à la conservation, à la préparation et à la consommation des aliments ;
7° Les appareils nécessaires au chauffage ;
8° La table et les chaises permettant de prendre les repas en commun ;
9° Un meuble pour ranger le linge et les vêtements et un autre pour ranger les objets ménagers ;
10° Une machine à laver le linge ;
11° Les livres et autres objets nécessaires à la poursuite des études ou à la formation professionnelle ;
12° Les objets d'enfants ;
13° Les souvenirs à caractère personnel ou familial ;
14° Les animaux d'appartement ou de garde ;
15° Les animaux destinés à la subsistance du saisi ainsi que les denrées nécessaires à leur élevage ;
16° Les instruments de travail nécessaires à l'exercice personnel de l'activité professionnelle ;
17° Un poste téléphonique permettant l'accès au service téléphonique fixe ou mobile."

  •  Quelles sont les quotités du salaire saisissables ? (Barème de saisie-attribution sur salaires)

Le décret n°2015-1842 du 30 décembre 2015 révisant le barème des saisies et cessions des rémunérations fixe la fraction saisissable (article R 3252-2 du Code du Travail).

Cette fraction saisissable vaut à compter du 1er janvier 2017.

Tranches Rémunération annuelle Rémunération mensuelle Part saisissable Montant maximum mensuel saisissable (par tranche) Montant maximum mensuel saisissable (cumulé)
1 Inférieure ou égale à 3 730 € Inférieure ou égale à 310.83 € 1/20 15.54 € 15.54 €
2 De 3730 à 7280 € De 310.83 à 606.67 € 1/10 29.58 € 45.13 €
3 De 7280 € à 10 850 € De 606.67 à 904.17 € 1/5 59.5 € 104.63 €
4 De 10 850 à 14 410 € De 904.17 à 1200.83 € 1/4 74.17€ 178.79 €
5 De 14 410 à 17 970 € De 1200.83 à 1 497.5 € 1/3 98.89 € 277.68 €
6 De 17 970 à 21 590 € De 1 497.5 à 1 799.17 € 2/3 201.11€ 478.79 €
7 Supérieure à 21 590 € Supérieur à 1 799.17 € 100 % Intégralité des revenus 478.79 € + la totalité des sommes au-delà de 1799.17 €

Exemple :

Un salarié perçoit un salaire de 1 000 € net par mois. Son employeur peut opérer par mois, au titre d'une saisie, une retenue :

- égale à la fraction saisissable applicable à la tranche de rémunération inférieure à 904.17€, soit 104.63 €

- à laquelle il convient d'ajouter la fraction saisissable applicable à la partie du salaire comprise entre 904.17 et 1 000 €, soit : (1 000 € -904,17 €) x 1/4 = 23.96 €

Dans cet exemple, la retenue mensuelle sera de : 104.63 € + 23.96 € = 128.58 €

ATTENTION : Ces barèmes sont augmentés de 1 420 € par an (soit 118.33€ par mois) et par personne à charge sur présentation des justificatifs (conjoint, concubin, partenaire lié par un PACS, enfant à charge et ascendant aux ressources inférieures au montant du RSA vivant avec le débiteur) (article R 3252-3 du Code du Travail).

(Attention : ces biens demeurent cependant saisissables s'ils se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi demeure ou travaille habituellement, s'ils sont des biens de valeur, en raison notamment de leur importance, de leur matière, de leur rareté, de leur ancienneté ou de leur caractère luxueux, s'ils perdent leur caractère de nécessité en raison de leur quantité ou s'ils constituent des éléments corporels d'un fonds de commerce.; ils peuvent également être saisis dans certaines circonstances pour le paiement de leurs prix même.)

Exemple 2 : Saisir le JEX pour demander des délais de paiement.

Dès lors qu'un commandement ou qu'un acte de saisie a été signifié, le JEX peut octroyer, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite de deux années, un report ou un échelonnement du paiement des sommes dues.
Il peut même décider que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit (qui ne peut être inférieur au taux légal) ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.                  

    - De même, le JEX est compétent en matière de mesure conservatoire, dont le but est de prévenir l'insolvabilité du débiteur en rendant ses biens indisponibles ( le débiteur continu d'utiliser ses biens, mais il ne pourra pas les vendre).

     -En matière de saisie immobilière, dont la procédure, accélérée depuis 2006, est régie par les articles L 311-1 à L 341 -1 du CPCE, le JEX joue un rôle primordial en veillant à préserver les intérêts du créancier et du débiteur, et dans laquelle le recours à un avocat est obligatoire. (Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site internet suivant: saisie immobilière)

    - Le JEX est compétent pour les demandes en réparation (dirigées contre le débiteur ou le créancier) ayant comme source une mesure d’exécution (Art 213-6 a4 COJ). 

Compétence territoriale:

Au regard des dispositions de l'article R 121-2 du CPCE,et à moins qu'il n'en soit disposé autrement, le JEX territorialement compétent est, au choix du demandeur, celui du lieu où demeure le débiteur ou celui du lieu d'exécution de la mesure. Lorsqu'une demande a été portée devant l'un de ces juges, elle ne peut l'être devant l'autre.

Si le débiteur demeure à l'étranger ou si le lieu où il demeure est inconnu, le juge compétent est celui du lieu d'exécution de la mesure.

Procédure devant le JEX:

Elles est à la fois soumise au droit commun de la procédure civile et au droit spécial de la procédure civile d’exécution.

Il existe une procédure spéciale (sur requête: cela signifie que le créancier agit sans informer le débiteur qui ignore l'existence de la procédure et ne nécessite pas le recours à un avocat) et une procédure ordinaire.

IMPORTANT: A tous les stades de la procédure, et avant même la saisine du JEX, L'Huissier de Justice joue un rôle central en matière de voies d'exécution. Il doit respecter les procédures spécifiques des voies d'exécutions et peut engager sa responsabilité en cas d'erreur.

Vous pouvez consulter notre page consacrée à l'Huissier de Justice pour vous renseigner.

Modalités de saisine et représentation :

Le juge de l’exécution est saisi, sauf en matière d’expulsion, par voie d’assignation qui doit être motivée en fait et en droit. Il est donc nécessaire de consulter un Huissier de Justice, habilité à la rédaction des assignations.

L'avocat n'est pas obligatoire pour saisir le JEX  (article R 121-6 CPCE) mais il est toutefois plus prudent de prendre conseil auprès de l'un deux.

L'article R121-7 du CPCE précise la représentation devant le Juge :

"Les parties peuvent se faire assister ou représenter par :
1° Un avocat ;
2° Leur conjoint ;
3° Leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un pacte civil de solidarité ;
4° Leurs parents ou alliés en ligne directe ;
5° Leurs parents ou alliés en ligne collatérale jusqu'au troisième degré inclus ;
6° Les personnes exclusivement attachées à leur service personnel ou à leur entreprise.
L'Etat, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration."

Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial. (mandat écrit)

Pour le paiement des frais (frais de l'Huissier et/ou de l'avocat notamment), l'aide juridictionnelle peut vous être accordée si vos revenus ne dépassent pas un plafond prévu par la Loi (voir plafonds d'AJ).

Renseignez-vous auprès du service du Bureau de l'aide Juridictionnelle de votre Tribunal Judiciaire !

Si vos revenus ne vous permettent pas de bénéficier de cette aide de l'Etat, votre assurance de protection juridique peut éventuellement fonctionner. Renseignez-vous auprès de votre assureur !